Des bouquins en pagaille. 

Pas facile de faire un choix dans la forêt des prix littéraires et des best sellers ( ce qui ne correspond pas toujours) qui cache la forêt justement. Le Goncourt 2010( pas celui de cette année) LE Michel Houellebecq de "la carte et le territoire", et sa quête du père. Des formidables voyages du héros entre son appart et la supérette voisine, à sa réussite artistique, ce photographe mondain se prend de passion monomaniaque pour les cartes Michelin (d'où le titre) dont il fait un succès. Lassé de cette obsession, et pas très sûr d'avoir un avenir, c'est l'auteur Houellebecq qu'il va choisir comme modèle. L'archétype du personnage No Future, veule, alcoolique, se retrouve au centre du récit où l'on croise Jean Pierre Pernod, riche organisateur de soirées très spéciales.  Je n'avais rien lu de cet auteur et j'ai la flemme (et pas le temps) de lire les autres, mais ce "roman" propose une belle réfléxion sur les affres de la création, le père absent et en filigrane la mort omniprésente. Un humour noir et efficace, un foutage de geule systématique, y compris de lui-même, Michel Houellebecq est un grand auteur et un individu sans intérêt, il ne cesse de le répéter !

houellebecq

 

L'été dernier a enfanté deux succès, peut-être plus, mais ceux-là je les ai lus, vous vous en contentrez donc.

William Boyd, l'anglais qui se repose en Dordogne, s'était à mon avis fait un peu oublié depuis quelques années, en dépit d'une livraison tous les deux ans de nouvelles et de romans. Orages Ordinaires se rangerait plutôt dans la case suspense, sur fond de crise de société. Adam Kindred, climatologue réputé, après un divorce américain difficile qui l'a laissé sur la berge, rejoint Londres pour un entretien d'embauche. Il va se trouver mêlé par hasard à un meurtre dont il va devenir le suspect principal. Point de salut hors la fuite. Disparaître, jusqu'à perdre son nom, et apprendre à vivre dans la rue. Au bord de la Tamise, dans un bosquet invisible, il lui va falloir repartir de rien. Et mener l'enquête pour se disculper. Mais il est un témoin génant, poursuivi par un tueur professionnel. C'est l'occasion pour Boyd d'une étude quasi sociologique, de la marge, mais à la façon d'hitchkock. Les paumés, les sans papiers, les prostituées, tout un monde exploité jusqu'à la moelle, qui se battent, y compris entre eux, pour survivre. Et Adam Kindred apprend vite. Et il a intérêt, le temps est compté. Un "polar" écrit par William Boyd, c'est pas Harlan Coben, ça vole beaucoup plus haut, et on s'en souvient longtemps. Les orages ordinaires c'est bien ceux qu'on traverse si souvent dans la vie. Parfois on en ressort léssivé, quelquefois on découvre la météo sous un angle inhabituel, et on finit par passer entre les gouttes.

                                   boyd

 

L'OVNI de l'été, c'est un premier roman. Avant d'aller dormir. L'auteur, c'est un homme, s'appelle S.J.WATSON. Retenez bien ce nom, on va en entendre parler. Les droits ont été immédiatement achetés par Ridley scott (mais si Alien, Gladiator..) c'est vous dire. Plus de 400 pages "écrites" à la première personne par Christine. Elle est amnésique. Elle oublie au fur et à mesure. Chaque matin elle se réveille à côté d'un inconnu. Son mari ? Et elle ne se reconnaît pas dans la glace de la salle de bain. Sa salle de bain ? Et puis le psy qui la suit, dont elle ne se souvient pas, a l'idée de lui faire écrire le journal de sa journée "avant d'aller dormir". C'est le début de la découverte du "mensonge" qui l'entoure. Impossible de vous en dire plus. On est vite pris au piège de ce mystère angoissant. On s'identifie forcément à Christine et à ses découvertes terribles. Sa mémoire qui flanche et votre coeur qui palpite.

                                     avant d'aller

 L'Automne 2011 c'est la sortie du dernier José Carlos Somoza, auteur espagnol d'origine cubaine. On le dit atypique. Probablement parce que les mondes qu'il crée sont chaque fois très documentés, que ce soit l'art contemporain(Clara et la pénombre) ou le passé, et les capacités sous-jacentes de notre cerveau. L'appât est donc la dernière cuvée de ce psychiâtre de formation. Comme chaque fois, on pénètre dans l'histoire sans préavis, sans notice explicative. Shakespeare est de la partie.Tous ses personnages, toutes ses intrigues contriendraient en germe l'explication de tous nos comportements. Et c'est ainsi que la découverte du psynome (dans un sens identique à celui du génome) et des phylias permet aux appâts de passer maîtres dans l'art de la "séduction" paralysante des tueurs psychopates. La police madrilène a en effet mis au point une sorte de GIGN qui s'entraine sur des scènes de théâtre à simuler toutes les phylias, leurs gestuelles et l'abandon qui s'y attachent afin de déclencher le plaisir qui paralyse. Le jargon qu'utilise Somoza n'est pas sans rappeler celui des psys, mais l'écoute bienveillante fait place ici à une véritable technique de combat. Le psychopathe qui sévit à Madrid est appelé le Spectateur, et c'est Diana Blanco qui s'y colle. Encore un "polar", glauque et tendu, où il faut à tous prix identifier le désir de l'autre pour le tuer de plaisir. Mais pas celui de lire, rassurez-vous. 

                               Somoza

Mais je vous parlerai bientôt de Fred vargas,et de Mathieu Lindon, prix Medicis pour "ce qu'aimer veut dire ". 

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